Pourquoi traiter, encore une fois, de ce sujet ?
Tout chrétien se pose tôt ou tard cette question. On va d’emblée identifier l’éléphant dans la pièce, ce n’est facile pour personne ! Chaque individu est différent, chaque histoire individuelle vient avec son lot de questions, de blessures et sa vision du monde. Partager sa foi, c’est s’adapter à chaque fois. Donc, on se met tous d’accord, prenons pour acquis comme présupposé de base, que l’évangélisation c’est difficile. Or, sachant cela, tentons au moins avec cet article de s’enlever le plus de bâtons dans les roues, question de partir sur de bases solides. Le but de cet article n’est donc pas de faire de vous une ‘’machine de guerre’’ de l’évangélisation, mais seulement que l’on puisse tous partir, au moins, au niveau zéro sans avoir de ‘’strikes’’ contre nous comme on dit au baseball. Je vous propose donc les trois étapes par lesquelles il faut passer afin de bien partager sa foi, prenez ça comme un genre de « starter kit » de l’évangélisation.
Étape numéro 1 : Comprendre l’Évangile.
Qu’est-ce que l’Évangile ? Un livre dans la Bible ? Le récit de la Pâques chrétienne ? Le message de l’amour chrétien ? Le fameux Jean 3.16 ? On sait que l’on doit le partager aux gens mais bien souvent, si on est honnête, on ne sait pas trop ce que c’est au juste… C’est malheureusement une chose trop souvent observée dans le milieu évangélique. Ce qui nous a sauvés, c’est l’Évangile ; ce que la Bible nous demande de proclamer et d’annoncer à toutes les nations, c’est l’Évangile. Partager sa foi c’est donc présenter l’Évangile. Mais pour le faire, il faut déjà le comprendre.
Le mot « Évangile » veut littéralement dire une « Bonne Nouvelle ». Une bonne nouvelle n’est pas un bon conseil. Un bon conseil te dit quoi faire dans le futur pour qu’il t’arrive de bonnes choses et pour qu’il ne t’arrive pas de mauvaises choses. Une bonne nouvelle, c’est l’inverse ! Ça te dit ce qui a déjà été fait pour toi dans le passé pour qu’il t’arrive maintenant de bonnes choses et pour te sauver des mauvaises choses. L’Évangile, c’est donc la « Bonne Nouvelle » de ce que Jésus a fait pour nous sauver ! Nous sauver de quoi ? Pour bien comprendre de quoi nous sommes sauvés, il est important de comprendre le « grand récit» de la Bible qui raconte l’Évangile.
On peut résumer facilement ce grand récit à l’aide des 4C (Création, Chute, Croix, Cieux). D’abord, par pure bonté et pure grâce, Dieu a créé le monde et ceux qui l’habitent dans le but que nous puissions jouir de sa gloire, non pas parce qu’il a besoin de nous, mais parce qu’il est gracieux. La création est parfaite, c’est le premier C.
Ensuite, l’être humain décide de vivre pour lui-même et de devenir son propre Dieu. C’est comme si mon petit cousin de cinq ans décidait de faire le souper tout seul et mettait maman et papa hors de la cuisine. Il ne va réussir qu’à mettre le désordre et le chaos dans la cuisine, risquer de tout brûler et de se blesser. Non seulement l’être humain a rejeté le Dieu créateur de la vie, mais il a aussi fait entrer la mort, la souffrance et le péché dans le monde. La descendance de l’homme est enfermée dans cette rébellion. Naturellement, nous n’aimons pas Dieu et ne voulons pas vivre pour sa gloire. Tout comme Adam et Ève, par nature, c’est-à-dire par naissance, nous voulons vivre pour nous-mêmes et les choses que nous aimons, tout en rejetant Dieu de nos vies. C’est le deuxième C, celui de la chute, il s’agit de la Mauvaise Nouvelle.
Toutefois, dans son immense amour et sa grâce, Dieu a préparé le moyen de nous sauver de nous-mêmes en envoyant son fils effacer notre péché, rétablir la relation avec Dieu et nous réserver pour la restauration de toute la création. Dieu prévoit restaurer sa création et il nous offre par son fils un moyen d’y participer. Alors qu’on ne pouvait pas aller à lui, lui est venu à nous en s’incarnant. Il a vécu une vie parfaite, il a vécu la vie que nous devrions vivre. Il accomplit ainsi tous les standards de perfection de Dieu que nous étions incapables d’accomplir. Ensuite, il reçoit la mort à la croix comme punition que nous méritions de recevoir à cause de notre rejet de Dieu et du péché que cela occasionne, nous réconciliant ainsi avec lui. Il a tout accompli pour nous représenter parfaitement et nous pardonner parfaitement. En vertu de notre foi en son œuvre, sa justice nous est transférée comme sur un compte bancaire. C’est-à-dire que si tu crois en Jésus et son œuvre, Dieu te voit comme son fils bien-aimé parfait, c’est notre statut devant les yeux de Dieu, même si en réalité sur cette terre nous sommes bien imparfaits. C’est le troisième C, celui de la croix, c’est la Bonne Nouvelle.
Le dernier C annonce ce qui prendra place à la fin, c’est la conséquence ou l’effet de la Bonne Nouvelle. Lorsque sa patience se sera écoulée, que son Église aura partagé la Bonne Nouvelle de la grâce de Jésus au plus grand nombre et que son peuple sera alors bien complet, il reviendra détruire ce monde imparfait, chaotique et souffrant et restaurer une création parfaite comme elle devait l’être. Il va aussi restaurer nos corps, c’est-à-dire, nous donner de nouveaux corps qui ne seront plus jamais soumis au péché et à la souffrance.
Étape numéro 2 : Comprendre son propre témoignage à la lumière de l’Évangile.
L’Évangile, c’est la Bonne Nouvelle de la grâce de ce que Jésus a déjà fait pour nous sauver de la destruction à venir en nous pardonnant notre péché et notre rejet de Dieu, en nous justifiant devant Dieu, en nous réconciliant avec lui et en nous réservant pour la restauration parfaite à venir. Tout cela est gratuit et immérité, il ne suffit que de le recevoir par la foi, comme un cadeau de grande valeur qui nous serait tendu. Sur papier, tout le monde est d’accord et on dit tous Amen ! Mais en pratique, lorsqu’on écoute attentivement le témoignage des chrétiens, ce n’est pas « l'Évangile » à proprement parler qui est présenté aux gens. Voyons ensemble quelques confusions qui reviennent souvent :
Présenter une moralité supérieure plutôt qu’une Bonne Nouvelle supérieure.
Lorsque je travaillais en milieu séculier avant de me marier, bien souvent les gens étaient impressionnés par mon abstinence avant le mariage. Les chrétiens aiment mettre en avant les différences que Dieu a apportées au niveau de leur éthique et de leur moralité. C’est bien de montrer que l’Évangile est une puissance pour transformer les cœurs, mais il faut que cette présentation soit équilibrée avec une présentation claire de l’œuvre de Jésus. Les gens doivent comprendre que le désir de plaire à Dieu que j’expérimente aujourd’hui vient de ma reconnaissance et de mon amour pour lui à cause de la Bonne Nouvelle de la grâce ! La moralité n’est pas la cause de mon salut, mais la conséquence de mon salut, car sinon vous envoyez le message que le but de Dieu ce n’est que de nous rééduquer, et que le salut offert équivaut à une amélioration morale. Cela envoie aussi le message que le standard pour être chrétien c’est de vouloir devenir une meilleure personne. Le problème c’est qu’on fait une confusion entre l’Évangile et l’effet que produit l’Évangile. Devenir plus moral n’est pas l’Évangile. L’Évangile dit que notre immoralité n’était que le symptôme de notre séparation et rejet de Dieu dans nos vies. Alors que nous étions encore ennemis de Dieu, il est mort pour nous ! L’Évangile dit que nous étions des cas désespérés et qu’il est venu nous racheter et réconcilier. C’est la joie et la reconnaissance de notre salut qui nous motivent aujourd’hui à vivre d’une manière qui plaît à Dieu. La moralité est l’heureux symptôme de notre réconciliation. Changer n’est donc pas l’Évangile, mais l’Évangile, lorsqu’il est reçu et compris, impacte nos vies et nous amène par la suite à changer. Ce qu’une personne a besoin de comprendre c’est qu’elle ne peut pas changer par elle-même et ne peut pas espérer plaire à Dieu d’une quelconque manière, c’est pour cela que Christ est venu tout accomplir. Cette œuvre peut être appropriée par la foi, c’est-à-dire mettre sa confiance dans l’œuvre de Christ qui nous sauve. Prêcher la moralité plutôt que l’Évangile c’est prendre le risque d’envoyer des abstinents en enfer.
Présenter une expérience personnelle déconnectée de l’Évangile.
Parfois certains optent pour la présentation d’une expérience spirituelle, voir mystique. La spiritualité fait partie de la vie chrétienne, mais encore une fois, faisons attention à ne pas envoyer le mauvais message. N’oublions pas que notre mandat est de présenter l’Évangile au monde. Convaincre un ami que nous avons des bons temps de prière peut l’intriguer, mais le convaincre ou même l’inviter à prier ne remplace pas le contenu de l’Évangile. Il doit comprendre QUI vous priez et POURQUOI vous pouvez prétendre vous approcher d’un Dieu aussi saint. Nous étions séparés de Dieu, grâce à Jésus, nous sommes parfaitement réconciliés, et en Jésus j’ai la certitude d’être reçu par Dieu, d’être écouté par Dieu et de recevoir une réponse selon sa sagesse, sa volonté et sa souveraineté. Pour beaucoup, la prière n’est qu’une bouteille lancée dans la mer de l’univers froid et impersonnel. Jésus nous a sauvés de la séparation d’avec Dieu. Nous prions avec foi et assurance, non pas en vertu de nos accomplissements, sinon Dieu n’aurait aucune raison de nous recevoir, mais en vertu de sa perfection à Lui ! Ça c’est une Bonne Nouvelle ! C’est notre confiance en l’œuvre parfaite de Jésus qui nous permet de nous approcher pleins d’assurance devant Dieu. Ne pas partager cette assurance c’est prendre le risque d’envoyer des religieux-prieurs-spirituels en enfer.
Présenter des fausses promesses qui ne viennent pas de l’Évangile.
L’Évangile nous a fait du bien, certes, cependant il est tentant de présenter certains aspects ou conséquences personnelles de l’Évangile comme des promesses mécaniques ou magiques. Dieu n’a pas besoin que nous fassions de la fraude spirituelle pour faire avancer son Royaume. Parfois,on présente l’Évangile comme s’il allait régler tous les problèmes de nos amis, comme s’il allait les rendre instantanément heureux, qu’il allait toujours remplir leurs cœurs, qu’ils allaient vivre spirituellement le ciel sur la terre, qu’ils auraient du succès à l’école et au travail, qu’ils seraient presque saints et sans maladie. Mais au final, notre vie est remplie de petits bobos, tout ne marche pas comme on voudrait, parfois nous nous sentons vides spirituellement ou émotionnellement, nous sommes affligés de voir que nous luttons avec des idoles et des péchés, nous tombons malades, nous avons de la misère dans nos études et nous perdons parfois nos emplois, quoi penser ? Dieu est-il menteur ? Loin de là ! Voici ce que Dieu, lui, a promis : c’est qu’en vertu de notre foi en son Fils, nous allons partager sa gloire à venir ! Mais, il a aussi promis que durant l’attente de son retour et durant la mission de l’Église de partager cette Bonne Nouvelle, nous allions aussi partager les souffrances de Christ. Plus Paul prêchait l’Évangile, moins ça allait bien dans sa vie, mais l’encouragement et la consolation du retour de Christ un jour le remplissaient de force et lui permettaient justement de dire que dans la pauvreté tout comme dans la santé il pouvait tout par ce Jésus qui le fortifie ! Le christianisme n’est pas vrai parce qu’il vient régler tous nos problèmes quotidiens, il est vrai parce que le Fils de Dieu est mort sur une croix il y a 2000 ans de cela et il est ressuscité prouvant ainsi qu’il était bien celui qu’il disait qu’il était et qu’il était bel et bien en mesure de vaincre la mort ! Et en vertu de notre foi en lui et de cet évènement grandiose, nous sommes réservés VIP pour son glorieux retour ! Voici une vraie promesse de l’Évangile, un jour toute larme sera essuyée par notre Seigneur, toute douleur sera oubliée et il n’y aura plus jamais de souffrance, plus jamais ! Confondre l’Évangile avec de fausses promesses c’est prendre le risque de remplir l’Église avec des gens destinés à l’enfer.
Présenter seulement des arguments apologétiques.
Comprenez-moi bien, il ne faut pas me faire dire le contraire de ce que je dis. Il est très bien d’avoir de bons arguments apologétiques sur l’existence de Dieu, sur la fiabilité de la Parole et sur l’historicité de Jésus, mais convaincre une personne sur ces éléments ne remplace pas, encore une fois, la présentation de l’Évangile. Nous ne sommes pas sauvés parce que nous croyons en Dieu ni même en la Bible. Les démons croient en Dieu aussi comme nous le dit Jacques. En revanche, nous sommes sauvés lorsque nous acceptons, par la foi, de recevoir l’œuvre parfaite de Jésus, elle seule est capable de nous justifier devant Dieu. Un argument apologétique peut être utile pour répondre à une question qui empêche la personne de recevoir le témoignage de Jésus. Un argument apologétique peut être utile afin de démontrer qu’il n’est pas déraisonnable de croire en Dieu, sa Parole et en Jésus. Un argument apologétique est excellent pour fortifier une foi naissante et édifier les croyants. Mais un argument apologétique en lui-même ne sauve pas et ne remplace pas la présentation de l’Évangile. Prouver l’historicité de Jésus ne remplace pas la présentation et la signification cosmique de son œuvre ! Défendre l’existence de Dieu, la fiabilité de la Bible et l’historicité de Jésus sans partager la Bonne Nouvelle de la grâce, c’est prendre le risque d’envoyer en enfer plusieurs personnes qui croient en Dieu, en sa Bible et même en l’existence de Jésus.
Étape numéro 3 : Comprendre l’approche la plus naturelle et directe.
Je me permets de rebondir sur le dernier point, afin de noter qu’un des éléments qui décourage souvent les chrétiens de partager leur foi au quotidien c’est qu’ils pensent que cela se transformera nécessairement en joute intellectuelle, qu’ils devront prouver plusieurs éléments apologétiques et maîtriser l’entièreté du débat du début jusqu’à la fin. Une telle vision de l’évangélisation est intimidante et épuisante, il est normal d’être nombreux à baisser les bras. Il ne suffit pas d’être celui qui parle le plus ou qui a le dernier mot pour bien témoigner de sa foi. Au contraire, il suffit d’écouter la personne. Pose des questions et parle avec cette personne le plus longtemps possible et surtout écoute bien. À travers son discours, tu vas identifier sa quête de sens, l'idole qui trône dans sa vie et ce qui est une mauvaise nouvelle pour elle. De là, tu as une porte en or pour présenter en quoi Jésus apporte une Bonne Nouvelle. Avant, je voulais convaincre tout le monde, maintenant je comprends que ce n’est pas la meilleure approche. Dernièrement, je parlais à d’anciens collègues de travail non-chrétiens. Rapidement, la question de mon emploi de pasteur est ressortie. L’une de mes collègues m’a partagé sur ses blocages avec la foi et les « choses de Dieu ». Au lieu de la confronter pour la convaincre qu’elle devrait s’ouvrir à la foi, je l’ai reçue sans étonnement. Je lui ai dit que je sais très bien qu’elle ne veut rien savoir des choses de Dieu et que c’est tout à fait naturel. Instantanément, cela a piqué sa curiosité. Comment crois-tu pouvoir comprendre mon expérience ? Me demande-t-elle ? Eh bien, parce que je viens de la même place que toi ! Lui répondis-je. J’ai commencé à lui expliquer comment, par nature, nous sommes ennemis des choses de Dieu et comment nous voulons absolument régner dans notre vie. Lorsqu’on y pense sérieusement, nous arrivons à en être conscients. Ce n’est pas tant l’idée de Dieu que ce que cela implique qui nous dérange en tant qu’humain. J’ai même réussi à lui demander : « si tu avais le pouvoir de changer ton cœur, crois-tu qu’il serait plus préférable pour ta vie de vouloir recevoir Dieu ?». Son honnêteté l’a poussée à répondre « oui, je sais que ce serait sûrement mieux, mais en même temps je ne veux pas ». Elle a tout de suite compris la lutte en elle. De là je peux lui présenter ce Jésus qui vient nous réconcilier avec Dieu, qui nous donne accès au Père et qui change le vouloir et le pouvoir de notre cœur. Reconnais ton besoin (repentance), reçois la solution par la foi (conversion) et remercie sa grâce (réconciliation).
En guise de conclusion, quelques ressources
J’aimerais conclure en proposant quelques ouvrages afin de mieux comprendre la Bonne Nouvelle de la grâce de Jésus appliquée dans nos vies, ainsi que quelques bons ouvrages d’apologétique. D’abord, il s’agit d’un gros livre, mais qui se lit tellement bien, je vous propose « Une Église centrée sur l’Évangile » de Timothy Keller. Sinon, du même auteur, je propose les deux ouvrages « La raison est pour Dieu: La foi à l'ère du scepticisme » et « Dieu, le débat essentiel: Une invitation pour les sceptiques» afin de posséder de bonnes réponses aux différentes questions d’apologétique. Pour finir, je recommande chaudement « Les idoles du cœur », encore une fois de Timothy Keller, afin de comprendre quelles sont les illusions et idoles que nous admettons naturellement dans notre cœur à la place de Dieu et comment celles-ci se transforment en mauvaise nouvelle et comment Jésus offre une meilleure nouvelle. Cela sera bon, premièrement pour vous, mais aussi lorsque vous allez écouter le discours des gens autour de vous.