Attention au sentiment de supériorité, de suffisance, d’arrogance spirituelle. Attention lorsqu'on s’auto-félicite de la propreté apparente de notre vie, lorsque les échecs deviennent tabous, et lorsque, petit à petit, à force d’employer des artifices pour minimiser et dissimuler le côté obscur de notre vie, on commence à devenir insensible, voire aveugle, au mal qu’il y a réellement dans notre cœur. Chrétiens et non-chrétiens ici-bas ont tous un cœur tortueux qui a désespérément besoin d’être gouverné par Jésus-Christ !
Le texte de Juges 19 met en scène 3 mauvais exemples (le Lévite, le beau-père du Lévite, les habitants de Guibea), 1 exemple relatif (le vieillard) et 1 victime (la concubine du Lévite). À travers ce texte, Dieu nous conduit à l’humilité et la lucidité sur nous-même, détruisant en nous tout sentiment de suffisance pour qu’on se tourne vers lui en confessant réellement notre besoin total de lui. Et on est au bon endroit dans la communauté chrétienne car on est en compagnie d’autres mendiants de la grâce, dont le seul espoir est en Dieu.
Ça commence mal ! (Juges 19 v.1-3)
Le texte rappelle qu’il n’y avait pas de roi en Israël : c’est une période d'anarchie où chacun agit selon ses propres désirs et c’est ce que l’on comprend dès les premiers versets. Un Lévite prend une femme de Bethléem comme concubine (acte contraire à la loi de Moïse qui révèle le grand dysfonctionnement moral en Israël : le Lévite est censé être un spécialiste du culte de l'Éternel !). La concubine, dans un acte d'infidélité, retourne chez son père, montrant sa détresse et son désir de sécurité. Elle y reste 4 mois avant que le Lévite revienne (cette longue attente témoigne de son indifférence et de son mépris pour elle, la considérant seulement pour ses services domestiques et sexuels).
Quelle tristesse ! Le Lévite n'est pas un exemple à suivre et sa concubine est une figure tragique, victime d'une situation chaotique en Israël où chacun agit selon son bon plaisir. On ressent de la compassion pour cette femme maltraitée et méprisée, soulignant les conséquences néfastes de cette période anarchique en Israël. L’anarchie n’est pas bonne pour nous non plus : le statut religieux et les connaissances ne sont pas suffisants pour faire les bons choix et pour mener sa vie d’une manière juste. On a besoin d’être gouverné par une autorité parfaitement fiable, juste, sage parce que livrés à nous-mêmes, on est facilement et rapidement entraîné par les mauvaises dispositions de notre cœur. Même si on est lévite ou membre de la meilleure église locale !
Le malaise grandit (Juges 19 v.4-21)
Le père de la concubine retient le Lévite plusieurs jours par des repas et des boissons, retardant leur retour. En chemin, ils évitent Yebous (Jérusalem), alors occupée par des Cananéens, et se dirigent vers Guibea, une ville de Benjaminites (des leurs donc). Cependant, personne ne leur offre l'hospitalité, si ce n’est un vieillard d'Éphraïm, qui les accueille chez lui. Le bon exemple relatif ici, c’est le vieillard. Peu de temps après la mort de Josué (Juges 20.28), ce vieillard a probablement connu la génération fidèle des Israélites qui sont entrés en terre promise (Josee 24.31).
L’auteur nous montre peut-être le gap, la fracture entre les premiers Israélites et les générations suivantes en train de glisser vers l’anarchie et le chaos. La foi n’a pas été transmise avec succès d’une génération à la suivante, la fidélité à l’Éternel ne perdure pas en Israël ! Toutes les conditions externes, matérielles, visibles, sociales ou religieuses ne suffisent pas à nous préserver (ou nos enfants) de la déviance, de la chute, du naufrage. On a désespérément besoin d’être gouverné par une volonté autre que celle de notre cœur !
On bascule dans l’horreur (Juges 19 v.22-25)
On poursuit la lecture de notre texte avec horreur. La déchéance morale en Israël est profonde en l'absence d'une gouvernance juste et d'un roi. Le passage raconte l’arrivée d’une horde de vauriens qui demandent à violer le Lévite. Le vieillard hôte refuse et propose des femmes à la place, le Lévite, pour se sauver, jette sans ménagement sa concubine dehors. Le cruel Lévite traite sa concubine comme un simple objet de consommation. On relève une similitude choquante avec le récit de Loth (en Gn 19) qui refuse de livrer ses invités aux hommes de Sodome.
MAIS en Juges, les assaillants sont des Israélites ! Malgré leur relation avec Dieu et leurs pratiques religieuses, ils sont capables des mêmes atrocités, de la même perversité et de la même corruption que les païens de Sodome. Et nous aussi, selon notre état naturel, sommes capables d’une telle ignominie. Le mal vient de notre cœur (Matthieu 15.19). Nous aussi, on peut être chrétien et vaurien (1 Corinthiens 5.1-2). Rien de ce qui est extérieur ne garantit ce qu’il y a à l’intérieur !
On touche le fond (Juges 19 v.26-30)
Toute la nuit, le Lévite n’en a que faire de sa concubine. À son départ et sans empathie, il la ramasse morte sur le seuil, la découpe en 12 morceaux qu’il envoie en Israël (symbole de la déliquescence des 12 tribus : autodestruction d’Israël). L’homme de foi qu’il devait être est en fait un traître ! La concubine représente l’épouse de l’Éternel, son peuple bien-aimé, à la fois coupable et victime. Ce passage nous fait désirer une issue à cette situation catastrophique, à cette spirale infernale. Puisqu’on a un cœur capable du pire et qu’on s’autodétruit, d’où viendra la délivrance ? « Grâces soient rendues à Dieu par JC notre Seigneur! » (Romains 7.25)
Applications
- La communauté des chrétiens reste une communauté de gens au cœur porté naturellement vers le mal. On est tous pareils, et on doit tous lutter ensemble en comptant sur la grâce inépuisable de JC et sur son règne bienveillant qu’il veut déployer en nous par le Saint-Esprit, à l’aide des moyens de grâce qu’il a institués pour notre bien : le culte, la Bible, la prière, la communion fraternelle.
- Les violences sexuelles existent dans le monde et dans l’Église (n°119 pour les violences sur des enfants / n°3919 pour les violences sur les femmes, site internet du CNEF : stop-abus.fr). On doit aussi être conscient de l’effet absolument diabolique et destructeur de la pornographie.
- Arrêtons de faire semblant. Renonçons à l’arrogance spirituelle, soyons authentique. Raclons le glaçage religieux de notre cœur pour accueillir la lumière.
- Recevons avec gratitude le règne de Jésus-Christ. C’est lui, le roi fiable, juste et parfaitement sage qu’il n’y avait pas en Israël, mais dont Israël avait tant besoin. Il saura nous gouverner pour notre bien, prendre le pouvoir sur notre cœur, lui donner des inclinations et des désirs nouveaux, et il saura nous transformer par le moyen de sa Parole, par la puissance de son Saint-Esprit, par le moyen de son Église.
À tous ceux qui se sentent abattus et sales, conscients de leur indignité, mais qui s’attachent à Jésus par la foi – à tous ceux qui ont une peine infinie pour la concubine du Lévite, parce qu’elle les renvoie à leur vie toute méprisée et abîmée – Dieu dit, comme s’il parlait à son Épouse bien-aimée : « Sois sans crainte, car tu ne seras pas honteuse ; ne sois pas confuse, car tu ne seras pas déshonorée ; mais tu oublieras la honte de ta jeunesse et tu ne te souviendras plus du déshonneur de ton veuvage. Car celui qui t’a faite est ton époux : l’Éternel des armées est son nom ; et ton rédempteur est le Saint d’Israël. Il se nomme Dieu de toute la terre ; car l’Éternel te rappelle comme une femme abandonnée dont l’esprit est affligé. » (Esaie 54.4-6)