Selon Netflix, tu es seul et tu t’ennuies

Lors d’une conférence sponsorisée par le Wall Street Journal[note]Note du traducteur : un quotidien national américain qui traite de l'actualité économique et financière[/note] l’année dernière, Reed Hastings, le PDG de Netflix a donné un discours pour expliquer la mission de son entreprise, un des poids lourd du divertissement : « Fondamentalement, nous voulons éliminer la solitude et l’ennui… c’est ce que fait le divertissement. »

Éliminer l’ennui et la solitude… Réfléchissez-y un moment, et vous réaliserez que seulement une de ces choses est vraiment un problème, alors que l’autre est en fait une opportunité.

L’ennui est-il un problème que nous devrions chercher à résoudre ?

Commençons par l’ennui. L’industrie du divertissement pense que nous devrions considérer l’ennui comme une mauvaise chose, et c’est pour cela que les publicitaires, les réalisateurs de films et de jeux vidéos collaborent pour créer des séries, des films et des jeux qui capturent notre attention et nous gardent préoccupés. Éliminer l’ennui ça rapporte.

Mais l’ennui est-il toujours un problème ou peut-il être une opportunité ? Si on demandait aux personnes qui ont pour travail de créer des choses, d’utiliser leur imagination, ils nous diraient que des choses géniales se passent quand on laisse libre cours à son imagination.

Pour la plupart des gens, éliminer l’ennui nécessiterait de choisir des activités qui ne requièrent presque aucun effort. Mais il existe de meilleures réactions, plus enrichissantes, face à l’ennui. Vous pourriez choisir des activités qui stimulent votre esprit et vos émotions. Ou alors tout simplement observer autour de vous et vous intéresser à votre environnement.

G. K. Chesterton a dit qu’il n’existe pas de sujets inintéressants sur terre, seulement des personnes non intéressées. L’ennui dans cette perspective, peut être passionnant :

Je peux me souvenir de l’excitation permanente de mon enfance, quand je passais des longues journées où rien ne se passait ; et de mon sentiment indescriptible de plénitude dans ces grandes salles vides. Et quand je me rappelle mon enfance (et que ce soit une force ou une faiblesse, je pense que je me souviens de plus que la plupart des gens), j’ai toujours un plaisir fort en repensant à ces endroits bizarres et silencieux, à ces coins négligés où rien ne se passe et où tout peut se passer ; dans des hôtels désuets, dans des salles d’attentes vides, des points d’eau vides. Il semblerait que nous avions besoin de ces endroits, et de la solitude qu’ils apportaient, pour nous laisser imprégnés de certaines suggestions et faire de notre subconscient un sol fertile. L’imagination de nourrit pas seulement de l’obscurité, elle peut même bénéficier de la monotonie.

L’ennui permet le cheminement de l’imagination. Il permet aussi de s’entraîner à l’autodiscipline. Sans l’ennui, comment pouvons nous enseigner à nos enfants à se comporter dans un restaurant, à chanter, prier et écouter dans les réunions d’églises, ou à poliment continuer une discussion, pas intéressante au premier abord ?

Nous ne devrions pas traiter l’ennui comme un problème à résoudre. Donc merci Netflix mais non, l’ennui n’est pas quelque chose que nous voulons éliminer.

Est-ce que Netflix peut guérir la solitude ?

Passons maintenant à la solitude qui, il faut l’admettre, est réellement un problème. L’auteur Thomas Wolf a décrit la solitude comme « l’expérience centrale et inévitable de chaque être humain ». Il me semble exagéré de dire que notre tristesse face à l’absence d’amis ou de compagnie est l’expérience centrale de chaque vie humaine, mais pour beaucoup dans notre société, c’est certainement le cas. La solitude est souvent accompagnée de sentiments d’inaptitude provoqués par l’absence d’amitiés profondes ou de seulement quelques relations superficielles.

La solitude présente des opportunités, tout comme l’ennui. Maya Angelou décrit la musique comme un refuge: « Je pouvais me réfugier dans l’espace entre les notes et tourner le dos à la solitude ». De la douleur liée à sa solitude sont venu les bénédictions de sa poésie.

Mais la solitude reste un problème. La solution à ce problème est l’amour d’amis et d’une famille, une relation d’amitié construite sur l’engagement avec quelqu'un. Mais la déclaration de Reed Hastings indique qu’il conçoit que l’ennui et la solitude sont un seul problème qui ne peut être réglé que par une seule solution : les distractions.

Irrité par l’ennui ? En recherche de compagnie ? Voici votre ordonnance : décompressez, relaxez vous et prenez deux heures de Netflix… Mais en fait comment est-ce que ça fonctionne ?

Devrions-nous penser que le remède contre la solitude c’est de penser avec nostalgie de l’amitié pré-technologie des enfants de Stranger Things ?

Est-ce que la solitude est résolue par un couple qui passe ses week-ends à regarder à la suite tous les épisodes d’une série sur Netflix, ou l’individu isolé qui navigue sans fin dans la bibliothèque de Netflix, dans l’espoir d’y trouver quelque chose d’intéressant ?

Est-ce que la solitude est résolue quand les membres d’une famille se retrouvent chacun sur sa tablette ou son portable pour regarder le programme qui correspond à ses intérêts.

Je ne pense pas.

La solitude est un besoin de l’âme ; Netflix est un pansement qui vous aide à passer les journées. Ce n’est pas le remède contre la solitude, mais un médicament pour continuer à l’endurer.

L’ennui, la solitude et l’Église

L’ennui et la solitude. L’Église a l’opportunité d’être contre-culturelle. Dans un monde dépendant des distractions, nous pouvons montrer que l’ennui peut être magnifique. Nous sommes plus humains, pas moins, quand nous résistons au désir d’être divertis en tous temps. L’ennui n’est pas un problème ; c’est une condition à une bonne vie, pour ouvrir les yeux aux merveilles de l’existence et nous changer en personnes intéressées.

La solution à la solitude se trouve non pas en Netflix, mais dans une relation avec Dieu, et avec Christ. Cette relation, plus profonde que des simples platitudes pieuses, est basée sur les promesses fondamentales de l’Évangile - le Dieu qui ne se sent jamais seul mais qui cherche toujours à être Dieu avec nous, et l’Église où l’amour de Dieu doit être mis en action dans la vie des personnes qui marchent avec nous sur le chemin de la foi.

La foi chrétienne prévoit un jour où la solitude ne sera plus. Mais ce jour n’est pas encore là. Dans ce monde déchu, de nombreux croyants feront face à des périodes de solitude intenses - distants de Dieu, ou isolés de leur époux/se, ou esseulé dans la foule. Mais, l’Église sait qu’un jour la solitude ne sera plus, et notre foi dans ce futur nous rappelle que notre besoin le plus profond n’est pas d’être distraits de notre solitude, mais d’en être délivrés. En attendant, la Parole de Dieu nous donne les ressources pour atténuer ce problème par la communion fraternelle, rendue possible par l’Esprit.

La vie vraiment connectée

L’ennui et la solitude viennent souvent ensemble. Notre incapacité à s’approprier l’ennui nous empêche d’approfondir nos relations. Puis, nos relations superficielles nous mènent à un sentiment plus profond encore de solitude et à plus d’ennui.

L’Église doit montrer que la vraie vie connectée ne devrait pas être définie par notre accès à Internet, l'usage de notre smartphone ou le visionnage de Netflix. C’est la vie connectée à Dieu et les uns les autres, avec des personnes que nous connaissons et qui nous connaissent, que nous aimons et qui nous aiment.

--Article traduit de l’anglais avec autorisation, merci à Sephora pour la traduction.

Auteur invité
et
Trevin Wax

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